La famille à Paris
Il est difficile, voire impossible, de se faire aujourd’hui une idée de ce qu’était Paris en ces temps-là. Certainement, l’ambiance latino ne ressemblait guère à celle du romantisme et de la bohème de Murger ; mais elle conservait, même altérée par les longues et vastes avenues de Haussmann, une physionomie originale et pittoresque, car la transformation profonde qui suivit totalement l’Exposition de 1900 n’était pas encore accomplie. Une grande ville française, habitée principalement par des Français, vivant à la manière française, d’une vie intense, c’est certain, mais avec des vestiges d’une existence patriarcale, non encore modifiée par le cosmopolitisme qui allait caractériser le XXᵉ siècle.
Lorsque je vins passer un week-end avec mon père, il me conduisait toujours vers les lieux historiques et les monuments. Ces visites portaient surtout sur les musées de la ville et de ses environs, comme Fontainebleau et Versailles. Des années plus tard, comprenant que, ce faisant, il ravivait pour moi, surtout, les mêmes impressions d’admiration et d’enthousiasme que lui avait laissées sa visite de 1867. Je me souviens qu’il me disait la même chose. Il manquait déjà à la ville de 1880 quelque chose de cette vie aristocratique, pleine d’élégance et de distinction, que le Faubourg Saint-Germain faisait rayonner sur le centre. Les lieux publics les plus en vogue, comme le Café Tortoni, la Maison d’Or ou le Café Anglais, n’avaient déjà plus le même goût ni la même clientèle.
Il me dit, plus tard, que l’on doit se garder de chercher à recomposer, à certains âges de la vie, quelques impressions de jeunesse, car la mémoire embellit les gens, les coutumes, le progrès lui-même, toujours en transformation. Ces confrontations laissent dans le cœur et dans l’esprit ce dessin incertain de la merveille que l’enfance sait garder intact sur les doigts d’une aile de papillon. « Il est préférable, me disait-il, de ne pas chercher à ressusciter ce qui est passé, mais de conserver dans notre mémoire les images que la mémoire a retenues. »
J’eus l’occasion d’entendre la même observation de Joaquim Nabuco, lorsqu’il me racontait ses impressions de sa première visite à Naples. C’était une ville encore sale, mais radieuse de couleurs, de lumière et d’un pittoresque incomparable, devenue depuis un quartier anglais remplacé par une construction impeccable, à la régularité authentique et à la banalité monotone des grandes métropoles modernes.
RIO BRANCO, Raul da Silva Paranhos de. Réminiscences du Baron de Rio Branco par son fils, l’Ambassadeur Raul de Rio Branco.
Brasilia : FUNAG, 2023.
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